La fin du journal télévisé traditionnel ?
Le modèle du présentateur "homme tronc" est en train de voler en éclat à la télévision américaine.
"Je bégaye, je parle trop vite, je ne finis pas mes phrases," reconnaissait récemment le présentateur de CNN Anderson Cooper dans le Philadelphia Inquirer, "je fais probablement un million de choses qui ne sont pas dans le manuel des présentateurs télé." Pourtant, cela n'a pas empêché le New York Times de lui consacrer un article particulièrement élogieux intitulé "un présentateur qui couvre les catastrophes avec le coeur sur la main." Et CNN vient de le nommer à la tête d'une émission quotidienne de deux heures en prime time.
Anderson Cooper s’est illustré lors des éditions spéciales de CNN en direct de la Nouvelle Orléans, après le passage de l’ouragan Katrina. A plusieurs reprises, il avait notamment violemment repris des hommes politiques qui refusaient de reconnaître l'ampleur de la catastrophe. Sa difficulté à retenir ses larmes en direct avait également ému les téléspectateurs. Avec Cooper, c'est donc un style moins impersonnel, plus engagé qui est récompensé. Pour promouvoir sa nouvelle star, CNN publie régulièrement sur la page d'accueil de son site Internet certains de ses articles, comme "le suicide de mon frère," ou "dîtes juste non au nouvel an."
Les JT des trois grands networks (ABC, CBS, NBC) connaissent également en ce moment de profonds bouleversements. Sur NBC, Tom Brokaw, parti à la retraite il y a un an, a été remplacé avec succès par Brian Williams, qui s'est lui aussi illustré pour son attitude très engagée lors de Katrina.
ABC pourrait bientôt nommer la première femme titulaire unique du fauteuil de présentateur d'un grand journal du soir. Elizabeth Vargas remplacerait ainsi Peter Jennings, décédé d’un cancer en août dernier.
De son côté, CBS n’a toujours pas trouvé de remplaçant à Dan Rather, qui avait dû démissionner après l’affaire du faux mémo sur les états de service de George W. Bush au Viet Nam. Pour l’instant, c’est Bob Schieffer qui occupe le poste depuis New York, et prend l’avion tous les week end pour Washington, où il anime l’émission politique Face the Nation. CBS évoque toute une série d’options pour prendre la relève, avec un ou deux présentateurs, voire aucun.
Enfin, en France, le groupe France Télévisions entreprend également de changer les visages qui apparaissent à l'écran. Il faut lire le New York Times pour avoir les détails de cette politique. Il s’agit d’un "programme discret de discrimination positive, appelé plan d’action positive pour l’intégration, conçu pour éviter de transgresser les lois contre l’embauche sur la base d’origines religieuses ou ethniques," explique le New York Times. "On n’a jamais écrit quelque part que l’on embauche en fonction de la couleur," précise Edouard Pellet, chargé de l’application de cette politique à France Télévisions. "On fait les choses en silence, ajoute-t-il, si on fait trop de bruit, ça va polariser les gens ; ça va devenir une question légale. Au lieu de parler, on agit."